Le dessinateur qui a signé son dernier album La Faim dans l’Histoire passerait-il à côté de la situation des agriculteurs ? Un blocus de Paris est redouté pour le début de semaine prochaine, suite aux annonces du Premier ministre. Des réponses insatisfaisantes face aux revendications, qui ont trouvé écho en plein Festival de la BD d’Angoulême.
Postée par les organisateurs de la manifestation, une photo officialise le soutien que la ville et le festival apportent aux agriculteurs. Un gigantesque kakemono contenant un dessin de Jul orne désormais l’Hôtel de Ville. Le protagoniste principal et père de famille du paléolithique, Blog Dotcom (Silex and the city, série déclinée en dessin animé, jeu de société, film, etc.), poings sur les hanches, affiche son agacement.
« L’invention de l’agriculture ? Tant qu’on ne pourra pas en vivre correctement, ne comptez pas sur moi », clame-t-il, sourcils froncés. Le tout titré : La préhistoire solidaire des agriculteurs.
Le coup de communication est fort, l’implication de l’auteur ne l’est pas moins. Et de rappeler que le FIBD s’est toujours montré sensible aux problématiques sociales. D’autant que lui avait subi quelques foudres à l’époque d’un certain t-shirt, évoquant les violences policières, et qui fut offert au président Emmanuel Macron.
Après un déjeuner avec des écrivains et éditeurs, Emmanuel Macron avait rencontré l’auteur de BD Jul, qui lui offrit un t-shirt avec l’inscription « LBD 2020 » et une mascotte d’Angoulême blessée. Macron prit la pose avec Jul et le t-shirt — une fois la photo sur Twitter, elle déclencha une controverse.
Des opposants à la réforme des retraites, des membres des Gilets jaunes et des syndicats de policiers critiquaient l’attitude du président. Pour certains, il affichait son indifférence envers les violences policières, tandis que d’autres y lisaient un manque de soutien envers la police.
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« J’ai eu une discussion avec Jul. Je suis en désaccord complet avec son approche. Je récuse le terme de violences policières. Je considère que la violence elle est d’abord dans la société. Donc je ne mets pas ces violences sur le même niveau », assurait le Président de la République. Qui dans le même temps, affirmait son plein soutien à la liberté d’expression.
« La bande dessinée ce n’est pas une espèce de monde clos, une bulle, mais c’est ouvert au monde extérieur, on se nourrit tous de ce qu’il se passe. Cette volonté de justice et d’égalité est dans les valeurs de la BD, bien souvent depuis ses origines », explique le dessinateur à France TV.
Dans son dernier ouvrage, il présente l’Histoire du monde à travers le contenu de nos assiettes, alliant humour et érudition. En explorant la gastronomie sous cet angle, on découvre la vie de nos ancêtres, leurs réflexions et leurs passions. Pas si loin des préoccupations des agricultrices et agriculteurs, grâce auxquels légumes et viandes ont fourni l’alimentation de l’humanité au fil des siècles.
En outre, il avait publié en 2005 Il faut tuer José Bové (près de 65.000 ventes, donnée : Edistat) : un titre qui plongeait les lecteurs dans une approche totalement folle du monde altermondialiste, à travers la célèbre figure du paysan. Un certain M. Fisher, un entrepreneur sans scrupules, lance une production en masse de poupées à l’effigie de José Bové en Asie.
Le projet commercial, pourtant, prometteur se heurte à l’obstacle d’un visa d’exploitation manquant : Bové refuse d’être une marchandise. L’option macabre d’engager un tueur à gages est envisagée, pour débloquer le flux financier.
« Je ne suis pas sûr que le paysage de la bande dessinée, et moi en premier, soyons très FNSEA, mais c’est vrai que tous les types d’agriculture souffrent aujourd’hui », ajoute l’auteur. Et d’ajouter : « Tout ce qui est assouplissement des normes environnementales, ça paraît aberrant dans le monde qu’on est en train de mettre en place. »
S’il importe de maintenir un dialogue, difficile pour lui d’imaginer que le monde de la BD soutienne le monde qui se profile… « Il y a plein d'auteurs qui mettent en scène ce monde paysan, c'est autant de façons d'en parler », souligne-t-il.
Crédits photo : FIBD
Paru le 24/11/2023
112 pages
Dargaud
22,00 €
Paru le 12/01/2005
43 pages
Albin Michel
12,75 €
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