Première chronique, première révélation : en dépit des mythes divers et variés qui l’entourent, la licorne lit. Certes, rien ne vaut une ballade entre les nuages pour s’aérer l’esprit, mais la licorne que je suis devenue (ma protubérance est arrivée assez tardivement) aime se plonger dans un bon bouquin, souvent, très souvent.
Le 03/07/2017 à 18:21 par La Licorne qui lit
Publié le :
03/07/2017 à 18:21
Si l’humanité doit être sauvée, ce sera sans aucun doute grâce aux écrivains, seuls êtres terrestres capables de mettre un peu de poudre magique dans le quotidien de leurs congénères !
Et, en ce début de période estivale, laissant déjà entrevoir l’arrivée d’une canicule qui risque de faire fondre ma corne, j’ai décidé, car finalement il faut bien que je remplisse les 864 années qui me restent (l’espérance de vie de la licorne est d’approximativement 1000 ans), j’ai donc décidé de vous donner le meilleur de moi-même et vous proposer mes chroniques-lecture aux couleurs de l’arc-en-ciel.
Première chronique, deuxième révélation : j’ai le cœur brisé. Un taureau m’a convaincue que nous pourrions dépasser nos différences, vivre heureux, nous installer et blablabla… Ce manipulateur vicieux, j’aurais dû me méfier des deux cornes, a juste oublié quelques éléments : ma crinière est rose, je mange des fraises tagada, je bois du champagne (rosé) et il est évidemment hors de question que je m’installe dans une ferme du sud-ouest pour jouer la troisième femme d’un bovidé, certes ultra sexy et d’une virilité extra-licornesque.
Je ne suis pas une vachette laitière, saperlipopette je suis un animal fabuleux. J’y ai cru, vraiment, mais raging-bull n’a pas supporté l’irruption du divin et de la grâce dans son existence.
Que lit-on en période de « ma vie est un désastre, je ne m’en remettrai jamais, donc je pars, je vole, à Saint-Tropez pour me remettre sur pied » ? Un livre, écrit par une fille, pour les filles et qui de préférence parle de filles et de leurs histoires malheureuses de corazon (j’avais appris quelques mots pour le sud-ouest…) Oh miracle, ne voilà pas que je tombe sur LE LIVRE chez ma copine Purple Stella, dont LE TITRE laisse penser que l’auteure a spécialement écrit son roman pour moi : « Je peux très bien me passer de toi », merci Marie Vareille.
Deux filles proches de la trentenaire éminemment attachantes : Chloé, super canon, malheureuse comme les pierres depuis sa séparation d’avec Guillaume, qui est sur le point de se marier avec Miss zéro-défauts, enchaîne les histoires sans lendemain. Constance, moins jolie, mais nettement plus originale, vit dans le No Sex Land depuis plusieurs mois.
Rien ne prédestine Chloé et Constance à devenir amies, hormis leur appartenance au même club de lecture et leur terre d’origine bordelaise commune. En fait, je corrige, quelque chose d’essentiel les lie : leur désir d’être heureuse, de se départir des conventions imposées par la société, vivre la vie qu’elles ont choisies et réaliser leurs rêves. Symboles de cette génération de femmes qui se pensaient, à tort, libres et libérées, Constance et Chloé prennent conscience qu’il est encore temps d’agir pour ne pas tomber dans le piège d’un simulacre de bonheur médiocre, mais supportable, car entouré d’une certaine dose de stabilité…
Les deux copines concluent un marché : l’une démissionne et part s’installer à Marinzac pour écrire son roman, et promet de ne pas toucher au fruit défendu. L’autre, entreprend un coaching en séduction et s’engage à sortir de son univers asexué avec le premier inconnu qui se présente. Naturellement le tout ne se passera pas exactement comme prévu, mais on ne choisit pas ce genre de lecture pour être surprise, ni tenue en haleine.
Non, on le lit, le dévore, s’endort avec, car c’est un bouquin qui nous parle, qui nous ressemble, nous représentantes de la gent féminine, qui galérons un peu (les licornes aussi…) à être tout ce que l’on devrait être : femme fatale, professionnelle (sur — ) performante, maman attentionnée, fille reconnaissante, amie fidèle, tout cela sans que notre mascara ou nos larmes ne coulent. On a voulu notre indépendance, on l’assume. Nous voilà obligées à être le mix parfait d’Angela Merkel, Beyoncé et Georges Sand.
L’écriture de Marie Vareille est simple, fluide, rythmée. Elle fait preuve d’un réalisme empli de tendresse, qui permet au récit de ne pas tomber dans gnangnan dégoulinant. L’auteure a dû laisser traîner ses oreilles — cafétéria, institut de beauté, salle de sport, after-work — pour recomposer la femme, ou les femmes de 2017. Elle dépeint des scènes que nous avons toutes vécues avec un humour fin et contagieux, qui aide à relativiser ces instants que nous considérons comme des échecs.
Non, ces épisodes parfois ridicules, humiliants, comiques ne sont que des tranches de vie partagées par la plupart d’entre nous. Je me suis surprise, plusieurs fois, alors que je prenais le sky-bus, à rire aux éclats : entretien d’embauche raté pour le job de sa vie, gros râteau suite à un auto-challenge que l’on s’est lancé un soir de désespoir, évaluation de fin d’année non préparée en raison d’un méchant coup de soleil qui fait maaaal, moment de honte ultime causée par un excès de mojitos lors du mariage de la cousine Françoise…
Les filles, même si vous êtes adeptes de grande littérature, je ne peux que vous conseiller « Je peux très bien me passer de toi ». Lisez-le au moins pour vous convaincre d’une chose : vous n’avez aucun besoin d’être parfaite, pour être heureuse… au contraire, restez maladroites, cessez de vous ruiner en crèmes anticellulite, continuez à dire des gros mots, gardez votre spontanéité, et surtout n’arrêtez pas les mojitos (ou passez au champagne au pire). Vivez VOTRE vie et poursuivez sans relâche VOS rêves… vous n’est ni un plan B, ni une option : laissez-vous être une priorité !
Semaine prochaine, je vous raconte ma mère, les mères, la mère inconnue de Philippe Labro. En attendant j’ai un apéro à Nikki beach avec Fluffy !
Je peux très bien me passer de toi – Marie Vareille - 9782368120378 – Editions Charleston – 19,90 € / 9782368121214 – Editions Charleston poche – 8,50 €
Paru le 08/06/2015
317 pages
Charleston
19,90 €
Paru le 13/01/2017
342 pages
Charleston
8,50 €
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